École italienne et espagnole

SAINT JEAN L’ÉVANGÉLISTE

Eberhardt KEILHAU dit Monsù Bernardo (1624-1687)

1660-1670

Agrandir l'image jpg 156Ko (Voir légende ci-après) (fenêtre modale)
Eberhardt Keilhau (1624-1687) St Jean l'Evangéliste, 1660-1670, huile sur toile, 97 x 72 cm © musée des beaux-arts de Quimper

Huile sur toile

873-1-689

Legs de Silguy, 1864

H. 97 ; L. 72 cm

Élève de Rembrandt (1606-1669) à Amsterdam de 1642 à 1644, Keilhau, peintre d’origine danoise s’expatria en Italie en 1651 et fit toute sa carrière là-bas. Son premier séjour fut vénitien (1651-1654) ; il se rendit ensuite à Bergame, Milan, Ravenne puis s’installa définitivement à Rome (1656). Ce superbe tableau se rattache à sa production romaine des années 1660-1670. Il est le fruit des expériences artistiques du peintre qui, sans doute dès ses débuts à Amsterdam, avait déjà connu les peintures de Ribera (1591-1652). Influencé aussi par la mode en Hollande dans les années 1630 du tonmalerei, courant pictural caractérisé par l’emploi prévalent de la couleur brune avec des résultats presque monochromes, il développa un goût certain pour le clair-obscur ténébreux.

Son interprétation de ce type de figures réalistes et grandeur nature représentées à mi-corps, diffusé par Ribera, ne manque pas, ici, de tempérament. Le chromatisme est audacieux : la palette est aux trois-quarts composée de bruns et de roux, tonalités chaudes qui définissent le personnage et son drapé, tandis que le ciel est d’un bleu froid ; le sablier crée une délicate tache rouge. Ce contraste entre couleurs primaires et couleurs tertiaires dynamise l’image. La touche est impressionnante de vivacité et de spontanéité. Dans certaines parties de l’image apparaissent de longues traînées comme si le peintre avait exercé une forte pression sur la toile avec sa brosse pour l’essuyer. Ces traces désordonnées, visibles au niveau de l’épaule du saint, sont surtout apparentes dans le ciel, qui donne l’impression d’avoir été barbouillé. Des coulures de matière sont posées çà et là et donnent beaucoup de relief à la représentation : on trouve des touches de rouge sur le nez du saint, sur sa joue, des taches claires sur ses mains. Cette technique fait tout son effet à distance. L’exécution tourmentée de l’œuvre n’a d’égal que l’expression fiévreuse de saint Jean au regard inquiet qui semble déchirer la page froissée de son Évangile de sa main rustique et épaisse. Keilhau montre ainsi son l’intérêt pour le portrait psychologique hérité de Rembrandt. La vision profondément humaine et le naturalisme populaire de ce type de figures inspira à son tour les scènes de genre et les « têtes de caractère » d’autres peintres italiens.

Mylène Allano, historienne de l'art

École italienne et espagnole

SAINT JEAN L’ÉVANGÉLISTE

Eberhardt KEILHAU dit Monsù Bernardo (1624-1687)

1660-1670

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Eberhardt Keilhau (1624-1687) St Jean l'Evangéliste, 1660-1670, huile sur toile, 97 x 72 cm © musée des beaux-arts de Quimper

Huile sur toile

873-1-689

Legs de Silguy, 1864

H. 97 ; L. 72 cm

Élève de Rembrandt (1606-1669) à Amsterdam de 1642 à 1644, Keilhau, peintre d’origine danoise s’expatria en Italie en 1651 et fit toute sa carrière là-bas. Son premier séjour fut vénitien (1651-1654) ; il se rendit ensuite à Bergame, Milan, Ravenne puis s’installa définitivement à Rome (1656). Ce superbe tableau se rattache à sa production romaine des années 1660-1670. Il est le fruit des expériences artistiques du peintre qui, sans doute dès ses débuts à Amsterdam, avait déjà connu les peintures de Ribera (1591-1652). Influencé aussi par la mode en Hollande dans les années 1630 du tonmalerei, courant pictural caractérisé par l’emploi prévalent de la couleur brune avec des résultats presque monochromes, il développa un goût certain pour le clair-obscur ténébreux.

Son interprétation de ce type de figures réalistes et grandeur nature représentées à mi-corps, diffusé par Ribera, ne manque pas, ici, de tempérament. Le chromatisme est audacieux : la palette est aux trois-quarts composée de bruns et de roux, tonalités chaudes qui définissent le personnage et son drapé, tandis que le ciel est d’un bleu froid ; le sablier crée une délicate tache rouge. Ce contraste entre couleurs primaires et couleurs tertiaires dynamise l’image. La touche est impressionnante de vivacité et de spontanéité. Dans certaines parties de l’image apparaissent de longues traînées comme si le peintre avait exercé une forte pression sur la toile avec sa brosse pour l’essuyer. Ces traces désordonnées, visibles au niveau de l’épaule du saint, sont surtout apparentes dans le ciel, qui donne l’impression d’avoir été barbouillé. Des coulures de matière sont posées çà et là et donnent beaucoup de relief à la représentation : on trouve des touches de rouge sur le nez du saint, sur sa joue, des taches claires sur ses mains. Cette technique fait tout son effet à distance. L’exécution tourmentée de l’œuvre n’a d’égal que l’expression fiévreuse de saint Jean au regard inquiet qui semble déchirer la page froissée de son Évangile de sa main rustique et épaisse. Keilhau montre ainsi son l’intérêt pour le portrait psychologique hérité de Rembrandt. La vision profondément humaine et le naturalisme populaire de ce type de figures inspira à son tour les scènes de genre et les « têtes de caractère » d’autres peintres italiens.

Mylène Allano, historienne de l'art

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